Routine - Annexe 2
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Un lieu commun répété à l’infini…
« Si l’on en veut croire les anciens Jardiniers entêtés de leur vieille routine, il faudra faire un trou à l’arbre au travers de la tige, & y mettre une cheville de bois de chêne bien sec. » (Le Jardinier solitaire…, 1705) : 229-230)
« Les Laboureurs, les jardiniers, les Vignerons suivent une certaine routine qu’ils tiennent de leurs pères, & qu’il n’est pas aisé de leur faire changer en des usages plus utiles, & souvent moins pénibles. » (Vallemont, 1734 : 58-59)
« Il reste encore un petit nombre de fermes dont les champs sont ouverts, & ne peuvent jouir du bénéfice des prairies artificielles. Quelques-uns de ces propriétaires cependant ont glaisé leurs terres ; mais ils n'en retirent pas autant d'avantage que leurs voisins qui sont enclos. La raison en est simple, ils suivent la routine de leurs quadrisaïeuls. » (État de l’agriculture du comté de Norfolk, cité par Forbonnais, 1754 : 564).
« M. Duhamel, & ses zélés correspondants ayant beaucoup perfectionné les instruments de M. Tull, ont démontré au public, par une suite d’expériences, l’excellence de ses principes. (…) Néanmoins il est à craindre (…) que le commun des Fermiers & Cultivateurs ne s’obstine à garder son ancienne routine si infructueuse » (Patullo, 1758 : 5-7).
« En France on s’est beaucoup plus occupé de Manufactures & de Fabriques de toute espèce que de la culture des terres ; cette dernière partie a été abandonnée aux préjugés & à la routine du Laboureur » (Alletz, 1760, article Agriculture).
« Ces prix d'agriculture ne devaient point être proposés pour des objets sur lesquels l'intérêt excite assez les Cultivateurs à travailler ; ils s'y appliquent communément autant qu'ils le peuvent : mais sur des objets qui ne tendraient pas si directement à leur profit, & qui les forceraient à sortir de la routine ordinaire. » (Home, [1757] traduction 1761 : 153-154).
« Reste à savoir si la routine, la nonchalance & l’économie mal entendue des Laboureurs ne les détournera pas de profiter des recherches de M. Tillet » « 5°. Que tous ces avantages peuvent s'obtenir par un économe intelligent, sans augmenter les frais de culture ; n'avons-nous pas lieu d'espérer que ceux qui sont incapables de se laisser subjuguer par la routine, & qui se sentiront assez d'activité & d'intelligence pour présider à toutes les opérations qu'exige notre culture, cesseront de faire des objections » (Duhamel du Monceau, 1762 : 333 et 497).
« On y voit d’une façon bien évidente que toutes nos terres en général, c’est-à-dire tous nos corps de Ferme, ne rapportent ni la moitié, ni le tiers, ni même le quart de ce qu’on devrait en tirer ; on y découvre que tout ce désastre provient des routines de nos Laboureurs, du défaut de prairies & de bestiaux ; & qu’il est encore occasionné par les charges & impôts auxquels se trouvent obligés nos gens de Campagne. » « Comme il ne suffit pas de retirer nos Laboureurs de leurs routines pour donner une pleine prospérité à l’Agriculture » « ce Manuel qui est fait pour nos laboureurs de France à l’effet de les retirer de leurs routines » (la Salle de l’Étang, 1764 : ii-iii ; vii ; 323).
« Ces principes dérivant essentiellement de la physique & de la mécanique, conduiront bientôt le cultivateur éclairé, de la théorie à la pratique, par les rapports naturels qu’ont entre elles ces deux parties concernant l’agriculture ; le laboureur, de son côté, instruit par le cultivateur devenu homme de l’art, remontera aux causes par les effets, reconnaîtra enfin ses erreurs, & aura honte de sa routine. » (Crasquin, 1771 : 12)
« Ce que Columelle disait aux romains, je crois devoir l’appliquer à mes compatriotes : les uns n’hésitent sur rien, & pensent que l’agriculture ne suppose aucune étude préliminaire, que le paysan sait tout ; les autres, au contraire, conviennent de la nécessité d’apprendre & de réunir la pratique à la théorie : mais ils ne prennent pas la peine d’étudier. La troisième classe connaît l’agriculture par les livres, paraît en parler doctement, & tranche décidément sur tous les objets, sans avoir aucune idée de la campagne, & sans être sorti de son cabinet. La quatrième classe enfin, est la classe routinière qui cultive sans réflexion, sans principe, laboure sa terre, taille sa vigne, comme son père avait labouré & taillé, sans réfléchir si on peut ou ne peut pas perfectionner la méthode du pays, ou lui en substituer une plus avantageuse » (Rozier, 1781, t. 1, article Agriculture)
« Si on désire cultiver ses champs, semer ses blés d’après une saine théorie, il faut absolument relire l’article Blé, afin de connaître à fond la belle anatomie que M. l’Abbé Poncelet en a publiée ; d’après quelles lois il végète, & comment il végète. Sans ces préliminaires, sans cette introduction à sa culture, on agira, comme le commun des hommes, d’après une routine aveugle, & on sèmera pendant toute sa vie sans en être plus instruit. » (Rozier, 1784, t. 5, article Froment).
« Nous vivons dans un pays fertile, où les terres ne rapportent pas moitié de ce qu'elles devraient faire, par la manière négligée de les cultiver. Les Cultivateurs attachés à leurs anciennes routines, n'osent pas se livrer à de nouveaux essais qui ne leur sont donnés que par des amateurs du bien public, qui ne les ont pas faits eux-mêmes. » « Nous voyons par-là quel profit peut faire un fermier intelligent, sur un petit terrain. Mais jamais un fermier médiocre ne pourra en approcher, en suivant la routine ordinaire […] Il faut espérer que l'Ouvrage que nous présentons aujourd'hui au public, leur fera concevoir cette vérité, & leur fournira tous les détails qui y amènent, malgré le mépris qu'en pourront faire ceux qui sont si attachés à leurs vieilles routines, qu'ils ne veulent pas même tâcher d'en sortir pour leur plus grand avantage. [« but common farmers will never equal any thing of this sort […] An employment of money, that will allow of such great advantages, much deserves a little more than the attention of common farmers. It is to be hoped, that this Kalendar will assist in such undertakings, and not turned to in vain by others, who design to pursue only the usual system of management.. »] (Young, [1778] 1789 : xii ; 13 – le texte anglais cité ici est celui de l’édition de 1771).
« Si tels sont les effets de l’ignorance et de la routine, dans le pays de l’Europe qui rassemble le plus de connaissances et de bonnes pratiques agricoles, à quoi devons-nous nous attendre en France ? » (Pictet de Rochemont, 1801 : 251).
« Restent donc les gens un peu à leur aise qui cultivent par eux-mêmes : ceux de cette classe qui ont un peu d'éducation et de bon sens, aiment à observer et acquièrent par conséquent cette connaissance; mais ils sont encore très rares, la plupart étant asservis à la routine, et ne cherchant pas à devenir plus savants. » (Chrestien de Lihus, 1804 : 23 ;
Les notes de l’édition 1804-1805 du Théâtre d’Agriculture d’Olivier de Serres regorgent de telles affirmations :
« L’agriculture, délivrée des chaînes féodales, a surtout besoin de lumières : il serait honteux que la révolution ne l’eût affranchie qu'à demi ; et tant qu’elle demeure encore esclave de l’ignorance et de la routine, elle n’est pas libre. » « Une physiologie exacte de la vigne, ne serait pas un livre de pure curiosité ; ces connaissances théoriques éclaireraient certainement la pratique des vignerons, laquelle n’est fondée que sur une routine ignorante et confuse. » « Je n’écris pas pour la routine : ceux qui ne trouvent rien de mieux que ce qu’ont fait leurs pères, sont les maîtres de conserver leur superstition; mais quand, de tous côtés, la physique et l’expérience font faire à toutes les sciences des progrès si sensibles et des pas si rapides, la seule économie rurale voudrait-elle rester esclave des vieilles habitudes ? la seule agriculture demeurera-t-elle en arrière ? » (François de Neufchâteau : LXVII ; 340 ; 661).
« L'agriculture française est maintenant si riche, à cet égard, qu'il ne s'agit plus que de faire adopter aux cultivateurs routiniers tout ce qui leur convient, et que de les engager à multiplier les prairies, surtout les prairies artificielles, plus profitables que les prairies naturelle » « La routine a tant d’empire sur les cultivateurs, qu’habitués à faire travailler leurs animaux à des heures fixes, ils ne savent pas changer ces heures quand les circonstances l’exigent. » (Tessier : 600 ; 625).
« Il faut bien se garder de se trainer dans l’ornière de la routine, comme cela n’est que trop commun » (Yvart & Huzard : 168) ; « la pratique constante de ceux qui ne suivent pas aveuglément la routine, et qui raisonnent leurs opérations » (Yvart : 170) ; « …cet usage, comme beaucoup d’autres, s’est perpétué par la routine et l’entêtement, qu’on prenait pour de l’expérience. » (Huzard : 631-632).
« … la méthode d'alterner, méthode salutaire et utile, préconisée avec justice par les agriculteurs praticiens qui ont écrit sur ce sujet ; méthode qui ne peut trouver d’opposition que dans l’ignorance ou l’entêtement d’une aveugle routine » (B. Granjean, 1799, cité par François de Neufchâteau, 1806 : 77).
« Y a-t-il un système au monde plus barbare, que celui qui force tous les cultivateurs d’une même paroisse à suivre la même agriculture, quels que soient leurs terrains ? Un système dans lequel dix hommes éclairés, qui désirent améliorer leur culture, sont enchaînés par un imbécile qui veut faire comme son grand-père ? » (Arthur Young, cité par François de Neufchâteau, 1806 : 122).
« Il n’y a pas longtemps qu’on parle d’assolements, dans les États-Unis d’Amérique : et la plupart des agriculteurs n’entendent encore aujourd’hui par le mot rotations de récoltes, que la succession, bonne ou mauvaise, des productions de la terre, telle que la comporte la culture d’usage dans le pays. Il n’y a qu’un très-petit nombre d’entr’eux qui sachent s’élever à des idées de perfectionnement ; car celui-ci suppose de l’attention, du travail, et des soins, au lieu que leur routine [old habits] a été acquise sans aucun effort, et en quelque sorte, sans qu’ils s’en aperçussent. » (Bordley, [1797] traduction 1808 : 87)
« ROUTINE EN AGRICULTURE. C’est une constance de pratique telle qu’elle s’oppose à tout changement, lors même qu’il est évidemment avantageux. (…) On peut supposer, sans craindre de beaucoup se tromper, que la routine, soit en occasionnant des pertes, soit en empêchant des améliorations, diminue de moitié les produits annuels du sol de la France. Elle est donc le plus terrible des fléaux de notre agriculture. » (Bosc, 1809).
« … tous les obstacles que leur opposent la routine et les préjugés (…) Cette ruineuse et très défectueuse routine (…) la culture des routiniers est languissante, parce que le cultivateur, en général malaisé, ne fait rien pour améliorer son sort et se traîne languissamment dans les sentiers de la routine que lui ont tracée ses devanciers (…) secouer le joug importun de cette antique routine (…) tant sont incurables les préventions de la routine » écrit Yvart en 1809 dans son réquisitoire contre la jachère, maintes fois republié par la suite.
« Cette routine s’est conservée dans des temps obscurs, de troubles, où l’agriculture tout entière était entre les mains de paysans plongés dans la stupidité et l’esclavage, sous l’inspection de la plus basse classe des gens libres, où les institutions que l’usage avait consacrées dominaient avec une puissance irrésistible sur les arts et les sciences, et où le plus léger doute élevé sur leur conformité avec les règles de la raison était envisagé comme une hérésie » (ThaerThaer, cité par Yvart, 1821, 1822 & 1838 – Nous n’avons pas trouvé le texte original en allemand).
« … ne serions-nous pas insensés de nous renfermer aveuglément dans notre ignorante routine, en face des lumières de la science, consacrées par l’expérience ? » (Picard, 1844 : 4).
« L’agriculture languissait dans des pratiques routinières ; la science agricole a été fondée quand des savants distingués y ont introduit l’expérimentation. » (Gasparin, 1854 : 6).
Références citées
- Alletz P.A., 1760. L’agronome, ou dictionnaire portatif du cultivateur contenant toutes les connaissances nécessaires pour gouverner les Biens de la Campagne, & les faire valoir utilement ; pour soutenir ses droits, conserver sa santé, & rendre gracieuse la vie champêtre. Paris, t. 1, 666 p. ; t. 2, 664 p. Texte intégral.
- Bordley, [1797] 1808. Systèmes de rotation, ou assolements. Traduction Pictet de Rochemont.,
- Bosc L.A., 1809. Article Routine en agriculture. Nouveau cours complet d’agriculture, t. 11 : 296.
- Chrestien de Lihus, 1804. Principes d’agriculture et d’économie, appliqués, mois par mois, à toutes les opérations du cultivateur dans les pays de grande culture. Paris, An XII, 336 p. [intégral] sur le Wicri Agronomie.
- Crasquin A., 1771. Le laboureur, ou cours d’agriculture pratique... Jombert, Paris, 171 p.
- Duhamel du Monceau H.L., 1762. Éléments d’agriculture, t. 1. Paris, 499 p. Texte intégral.
- Forbonnais F. (Véron Duverger de), 1754. Article Culture des terres. Encyclopédie e, ou Dictionnaire Raisonné des Sciences, des Arts et des Métiers, t. 4. : 552-566. Texte intégral
- François de Neufchâteau N., 1804. Éloge d’Olivier de Serres. In : Édition 1804-1805 du Théâtre d’Agriculture d’Olivier de Serres, t. 1 : XIX-XLVI. [1] Texte intégral
- François de Neufchâteau N., 1806. Voyages agronomiques dans la sénatorerie de Dijon. Paris, XII + 260 p. Texte intégral
- Gasparin A. de, 1854. Principes de l’agronomie. Dusacq, La Maison rustique, Paris, xii + 232 + 42 p. Texte intégral
- Home F., [1757] 1761. Les principes de l’agriculture et de la végétation. Paris, 155 p (+ 2 mémoires d’un auteur français anonyme). Texte intégral ou Texte intégral
- La Salle de l’Étang S.P. de, 1764. Manuel d’agriculture pour le laboureur, pour le propriétaire, et pour le gouvernement… Paris, xviii + 584 p. Texte intégral
- Le Jardinier solitaire, ou Dialogues entre un curieux & un jardinier solitaire, contenant la méthode... de cultiver un jardin fruitier et potager. 2e édition... augmentée de plusieurs réflexions nouvelles sur la culture des arbres, 1705. 480 p.
- Pattullo H., 1758. Essai sur l’amélioration des terres. Paris, 287 p. + planches. Texte intégral
- Picard (abbé), 1844. L’agriculture raisonnée, ou Manuel complet spécial du cultivateur dans les Deux-Sèvres et Départements de l’Ouest. Niort, xii + 454 p. Texte intégral
- Pictet de Rochemont C., 1801. Traité des Assolemens, ou de l’art d’établir les rotations de récoltes. Genève, 285 p. Texte intégral
- Rozier F. (Abbé), 1781-1789. Cours complet d’agriculture théorique, pratique, économique, et de médecine rurale et vétérinaire, suivi d’une Méthode pour étudier l’Agriculture par Principes, ou Dictionnaire universel d’agriculture. Paris, Texte intégral. T. 1, 1781, 704 p. + pl. Texte intégral ; t. 5 For-Jam, 1784, 736 p. Texte intégral
- Vallemont (Pierre le Lorrain, abbé de), 1734. Curiositez de la nature et de l’art sur la végétation, ou L’agriculture et le jardinage dans leur perfection... Paris, xxvii + 708 p.
- Young A., [1778] 1789. Calendrier du fermier ou Instruction, mois par mois , sur toutes les opérations d'agriculture qui doivent se faire dans une ferme. Traduit par M. le Marquis de Guerchy. Paris, xiv + 302 p. Texte intégral
- Yvart V.J.A., 1809. Article Jachère. In : A. Thouin et al., Nouveau cours complet d’Agriculture théorique et pratique ou Dictionnaire raisonné et universel d’agriculture. Paris, t. 7 : 333-358. Texte intégral
- Yvart V.J.A., 1821. Considérations générales et particulières sur la jachère et sur les meilleurs moyens d’arriver graduellement à sa suppression avec de grands avantages. Mémoires... de la Société d’Agriculture de Paris, année 1821 : 160-395. Idem, 1822, même titre, Huzard, Paris, 250 p. Texte intégral. Idem, article Jachère, in : Nouveau cours complet d’agriculture…, t. 8. Repris dans l’édition 1837-38 du même Dictionnaire…