Mesures de surface agraires - Complément 1

De Les Mots de l'agronomie
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Cette annexe se rapporte à l'article Mesures de surface agraires.

Signification politique des mesures de superficie

Auteur : Annie Antoine


Jusqu’à la Révolution, les unités de superficie, comme l’ensemble des unités de mesure, étaient extrêmement nombreuses et diverses en France. Ceci tient essentiellement à deux raisons : d’une part le lien avec le travail, surtout le travail de la terre, et d'autre part la signification politique des mesures. C’est en effet une prérogative seigneuriale que de donner la mesure des choses (obliger les vassaux à prendre le « marc » de la seigneurie suzeraine pour régler ses propres unités de mesures) et les États, provinces, royaumes… se font évidemment reconnaître cette prérogative au fur et à mesure de leur développement. Les mesures tendent de ce fait à former des unités régionales, se calquant plus ou moins sur le ressort des Coutumes. Jusqu’à la Révolution, même si les unités de mesure portaient parfois les mêmes noms dans des provinces ou des régions différentes – et même dans des entités territoriales beaucoup plus petites -, leur contenu pouvait être très variable d’un lieu à un autre, et évidemment d’une époque à une autre.

Du plus loin que l’on regarde, on voit les souverains français tenter, en vain, de légiférer sur les unités de mesure. Imposer des mesures uniformes est un moyen d’unifier et de dominer un territoire. En 789, Charlemagne essaie cette unification ; après lui, Charles le Chauve (864), Louis X et Philippe V (XIe siècle) tentent également d’imposer dans leurs états les mesures dont ils ont la garde. Au XVIe siècle, sous le règne de François 1er, les mesures « de Paris » ou « du Roy » commencent à gagner du terrain, à partir du domaine royal. Néanmoins, le pouvoir des grands seigneurs d’une part (pour eux c’est une question de prestige que de conserver l’étalon de la seigneurie), la pratique populaire de l’autre (qui reste attachée aux mesures locales) font que les tentatives de la monarchie pour faire triompher ses propres unités mesures (comme l’arpent du roi pour la mesure des terres) n’a que des résultats limités. C’est à partir de Louis XIV et de Colbert qu’est entamée une réflexion pour proposer des unités de mesure, notamment pour les longueurs et les superficies, qui puissent être assez générales pour que les astronomes, géographes, explorateurs puissent avoir des références communes. L’affaire aboutit au moment de la Révolution. La volonté politique est là encore essentielle. Imposer à tout le territoire un même mode de mesure est un moyen de lutter contre le pouvoir des seigneuries et effacer la diversité des coutumes locales. Le 7 avril 1795 (18 Germinal An 3), la loi entérine définitivement le nouveau système métrique (mètre pour les longueurs, are pour les surfaces, stère et litre pour les volumes, gramme pour les masses, franc pour les monnaies). Mais dans la pratique, les anciennes unités de mesure restent usitées parfois très longtemps.

S’il s’agit de convertir les anciennes mesures locales en mesures décimales, il est possible d’utiliser les tableaux de concordances des « anciennes mesures » avec les nouvelles qui ont été faits dans à peu près tous les départements au tout début du XIXe siècle. Par contre, pour les périodes antérieures, il est très difficile, et surtout très hasardeux, de penser qu’une hommée ou un journal ont eu une valeur semblable sur deux espaces différents et aussi, à l’intérieur d’un même espace, pour des époques différentes. Utiliser le tableau de concordance fait au début du XIXe siècle pour « traduire » en hectares des mesures médiévales est évidemment une action très audacieuse.


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