Assolement, rotation, succession, système de culture : fabrication d’un concept, 1750-1810 - Annexe 5

De Les Mots de l'agronomie
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Cette annexe se rapporte à l'article Assolement, rotation, succession, système de culture : fabrication d’un concept, 1750-1810.

Mélanges agronomiques, rédigés d’après la pratique et les expériences des meilleurs fermiers anglais (1799 - Extraits)

Extraits (p. 33 à 41) d’un ouvrage anonyme publié à Leipzig en 1799

« V. Sur l’inutilité des jachères et la manière d’exploiter les terres dans la province de Norfolk.

Quelques personnes ont mis en question : si les jachères d'été sont nécessaires on non ? Je suis une de celles qui pensent qu'elles ne le sont pas. La nature ne parait demander aucune pause ou repos de cette espèce; toutes les plantes font leurs pousses annuelles aussi régulièrement, que le jour succède a la nuit. La terre fut évidemment destinée à donner un produit régulier sans aucune interruption, et c'est ce qui arrive par tout où elle est abandonnée à elle même. Si vous ne semez pas du blé, elle produira des mauvaises herbes, car sa qualité végétative ne s'arrête jamais. C’est par cette raison que nous devons, par une bonne culture, détruire la mauvaise plante, et y en substituer une autre dont nous puissions tirer de l’avantage. L’idée de laisser reposer un terrain est ridicule, ayez soin d'en faire disparaitre les mauvaises herbes, et apportez beaucoup d'attention à alterner vos récoltes; de manière que la plante qui occupe une année votre terre, la fertilise autant qu'une autre l’épuiserait, et alors on pourra en tirer parti comme d'un jardin dans lequel une plante remplace constamment celle dont on vient de faire la récolte. Voyez plus de la moitié des terres en Angleterre, qui ne sont point encloses, et où le système établi par la vieille école est deux récoltes et une jachère ; mais que prouve cela? si non un conflit entre le fermier et les mauvaises herbes et dans lequel ces dernières finissent ordinairement par avoir le dessus, car elles ne sont presque toujours qu'à moitié étouffées, et jamais entièrement détruites. De l’autre côté, considérez la province de Norfolk, qui donne une récolte chaque année sans être épuisée, et quoique le sol, dans plusieurs cantons, soit léger et très ordinaire, en en éloignant les mauvaises herbes, il manque rarement de procurer un bon rapport:, ce qui met le fermier en état d'employer un plus grand nombre de bras, et de donner une rente plus considérable ; ce sont deux considérations très importantes, l’une étant d'un avantage général au pays, et l’autre au propriétaire.

Ce sujet a excité quelques doutes et objections ; je ne vois, néanmoins, aucun motif raisonnable pour soutenir la méthode des jachères. Les Pays-bas Autrichiens, une des plus fertiles parties de l’Europe, où les récoltes de grains et de fourrage alternent constamment, n'adoptent point, dans la rotation de leurs récoltes, une interruption aussi inutile, et cette province, qui est celle, qui en Angleterre, lui ressemble le plus, ne l’adopte pas davantage. En effet, la récolte des turnips y sert de jachère, et elle met certainement la terre dans un infiniment meilleur état que toute autre culture ne pourrait faire.

Ceux qui parlent de faire reposer la terre, paraissent la considérer comme un animal, qui, sans doute pour résister à son travail, a autant besoin de repos qne de nourriture, mais on ne peut d'aucune manière faire l’application de ceci a la nature de la terre, qui, par des aménagements convenables donnera toujours, sans interruption, de bonnes récoltes.

Je crois que la méthode des jachères, tire son origine de l’ancien état des terres qui n'étaient pas encloses, avant l’introduction des turnips et des prairies artificielles. Dans cette période de notre agriculture, l’usage des jachères était indispensable, parce qu'alors on ne tenait que peu de bétail en comparaison d'aujourd'hui, et que par conséquent les terres ne pourraient être ni si souvent ni aussi bien fumées que maintenant; mais lorsqu'on a commencé d'enclore les champs, on aurait du ailleurs abandonner la culture des jachères, comme on l’a fait dans la province de Norfolk; cependant dans les endroits, ou les fermiers tiennent encore à l’habitude désavantageuse de tirer de leurs terres trois récoltes de grain successives, là les jachères sont absolument nécessaires, mais ce n'est nullement une méthode utile dans l’agriculture de Norfolk.

La rotation des récoltes qui est la plus approuvée dans la province de Norfolk, est sur un terrain léger, et pour la

  • 1re année carottes ou turnips,
  • 2me - orge,
  • 3me - trèfle ou sainfoin[1] ,
  • 4me - froment,
  • 5me - fèves ou pois,
  • 6me - orge,
  • 7me - trèfle ou sainfoin.

Dans les terres fortes

  • 1re année pommes de terre,
  • 2me - orge ou avoine,
  • 3me - trèfle pendant deux ans,
  • 4me - froment,
  • 5me - fèves,
  • 6me - orge ou avoine,
  • 7me - trèfle pendant deux ans,
  • 8me - froment.

(...)

Mr. Young [dans Farmer’s tour through the East of England]] cite encore une rotation de récoltes, qui a eu le plus grand succès dans les terres fortes. 1 1re année choux,

  • 2me - fèves,
  • 3me - avoine,
  • 4me - trèfle,
  • 5me - froment.

Cette succession de récoltes est très avantageuse, car la quantité d’engrais qui provient du bétail, nourri avec les choux et le trèfle, enrichira la terre considérablement, et si, dans la poursuite d’un tel cours, on rendrait soigneusement aux champs tous les fumiers qui en proviennent, on en trouverait bientôt l’avantage exact, ce qu’on ne peut pas déterminer sans ce soin. (...)

Rotation des récoltes pour les terrains sablonneux

  • 1re année carottes,
  • 2me - navets,
  • 3me - orge,
  • 4me - fèves,
  • 5me - froment.

Cette rotation est fort bonne ; celle qui suit est également avantageuse :

  • 1re année navets,
  • 2me - orge,
  • 3me - trèfle,
  • 4me - froment,
  • 5me - fèves,
  • 6me - orge.

(…)

La meilleure rotation pour les terres grasses est la suivante :

  • 1re année fèves ou pommes de terre,
  • 2me - froment,
  • 3me - pois,
  • 4me - froment,
  • 5me - navets ou choux,
  • 6me - orge,
  • 7me - trèfle,
  • 8me - froment. »


  1. Quand on sème du Sain-foin, il faut le laisser en terre pendant six ou huit ans au moins, avant de labourer pour le froment.
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