Temps thermique (sommes de températures) - Annexe 2
Cette annexe se rapporte à l'article Temps thermique (sommes de températures). |
Les degrés sont des degrés Réaumur. Orthographe modernisée. |
Observations du Thermomètre faites à Paris pendant l’année 1735, comparées avec celles qui ont été faites sous la ligne à l’Isle de France, à Alger, & en quelques-unes de nos Isles de l’Amérique. (Réaumur, 1735, extraits)
Dans l’Histoire de l’Académie de l’année 1696 on trouve des Observations de M. de la Hire sur le froid & le chaud de cette année ; tant que le célèbre Académicien a vécu, il a continué ses observations du Thermomètre, & d’en publier les résultats. Après sa mort, de semblables observations furent faites par M. Maraldi ; & après le décès de M. Maraldi, elles l’ont été par M. Maraldi son neveu. Dans un temps où on avait moins de curiosité qu’aujourd’hui pour les observations physiques, & où l’on ne voyait peut-être pas autant de quelle utilité elles peuvent être, M. de la Hire crut que c’en était assez par rapport au Thermomètre, de publier dans les Mémoires de l’Académie, à quelle hauteur s’était élevée la liqueur du sien, le jour de chaque année où elle avait monté le plus, & jusqu’où elle était descendue, le jour où elle s’était trouvée le plus bas ; c'est-à-dire qu’il suffisait au Public, & même à bien des Savants, d’apprendre quel jour de l’année il avait fait plus chaud, & quel jour il avait fait plus froid à Paris. Mrs Maraldi, qui ont continué les observations thermométriques de M. de la Hire, s’en sont tenus à donner pour chaque année un résultat pareil à celui que ce Savant était en usage de donner. Depuis que l’on sait faire des Thermomètres dont les degrés sont comparables, depuis qu’on en peut avoir dont les degrés ont des valeurs fixes, il m’a paru qu’on serait bien aise de savoir un peu plus sur les degrés de froid & de chaud de chaque année, que ne nous en apprennent les résultats dont je viens de parler : qu’on verrait avec plaisir des comparaisons du plus grand froid & du plus grand chaud de chaque mois, qui nous apprendraient à combien de variations est sujet l’état de l’air dans lequel nous vivons ; qu’on serait bien aise, & qu’il ne serait pas inutile de pouvoir comparer ces changements de l’air de notre climat avec ceux de l’air de différents climats.
(…)
Cette année 1735 doit être mise au nombre des plus tardives ; la récolte des bleds & celle des vins ont été faites au moins un mois plus tard que dans les années ordinaires. Ce qui l’a rendue tardive, n’est pas précisément de ce que la chaleur n’a pas été considérable ; les blés sont souvent mûrs quand les plus grandes chaleurs de l’été se font sentir ; & les chaleurs de l’été n’avancent la maturité du raisin que quand elles agissent sur des terres suffisamment arrosées par des pluies : mais de deux année où les pluies auront été distribuées en égale quantité, & à peu près de la même manière, & cela dans les mois où elles sont le plus nécessaires, de ces deux années, dis-je, la plus précoce pour les grains & pour les fruits sera celle qui pendant les mois d’Avril, Mai & Juin aura eu une plus grande somme de degrés de chaleur. En 1734 les récoltes se sont faites d’assez bonne heure ; j’ai été curieux de comparer la somme des degrés de chaleur au-dessus de la congélation, désignés par ceux de notre Thermomètre, qui ont agi sur la surface de la Terre de ce pays, pendant chacun de ces trois mois de 1734, avec la somme des degrés de chaleur qui ont agi pendant chacun de ces trois mois de 1735. Comme les Astronomes prennent un temps moyen pour mesurer la durée du temps vrai, j’ai pris pour chaque jour un degré de chaleur moyenne ; & cela en ajoutant les degrés du Thermomètre qui ont exprimé la plus petite chaleur du matin, aux degrés qui ont exprimé la plus grande chaleur de l’après-midi ; la moitié de cette somme m’a paru pouvoir être prise pour le degré de chaleur moyenne. Par exemple, le 3 Avril 1735 à 6 heurs du matin, la liqueur du Thermomètre était à 4 degrés, & le même jour, à 3 heures après-midi, elle était à 8 degrés ; ces degrés ajoutés ensemble donnent 12 degrés ; j’en prends la moitié, 6 degrés, pour l’expression de degré du chaud moyen du 3 Avril. De tous les degrés moyens du mois d’Avril 1735, je fais une somme, & j’en fais de même une de tous mes degrés moyens du mois d’Avril 1734. La comparaison de ces sommes me fait voir la différence qui est entre les sommes des degrés de chaleur désignés par les degrés du Thermomètre, qui ont agi pendant le même mois de chacune de ces deux années.
En m’y prenant comme je viens de l’expliquer, & en suppléant par l’estime aux degrés qui ne se trouvaient pas marqués dans la Table aux heures les plus convenables, j’ai trouvé la somme des degrés moyens de chaud du mois d’Avril 1734 de 343 degrés, & celle du mois d’Avril de 1735 de 270. La somme des degrés de chaleur de Mai 1734 de 405 ; & celle des degrés moyens de Mai 1735 de 328. Celle des degrés de chaleur moyens de Juin 1734 de 512, & celle des degrés de chaleur moyens de Juin 1735 de 417. D’où l’on voit que la chaleur qui a agi sur la surface de la terre pendant chacun des mois d’Avril, Mai & Juin 1734, a été plus considérable que celle qui a agi pendant les mêmes mois en 1735, & d’où il suit que cette dernière année a dû être plus tardive que l’autre, comme elle l’a été. Peut-être paraîtra-t-il curieux de continuer les comparaisons de cette espèce, & de les pousser même plus loin, de comparer la somme entière des degrés de chaleur d’une année avec la somme entière des degrés de plusieurs autres années ; de faire des comparaisons de la somme des degrés de chaleur qui agissent pendant une même année dans les pays les plus chauds, avec la somme des degrés de chaleur qui agissent dans les pays tempérés, & la somme des degrés de chaleur qui agissent dans les pays froids ; de comparer entre elles les sommes des chaleurs des mêmes mois en différents pays. On fait des récoltes des mêmes grains dans des climats de température fort différente ; on verra avec plaisir la comparaison de la somme des degrés de chaleur des mois pendant lesquels les bleds prennent la plus grande partie de leur accroissement, & parviennent à une parfaite maturité dans les pays chauds, comme en Espagne, en Afrique, dans les pays tempérés, comme en France, & dans les pays froids, comme ceux du Nord.
Référence :
Mémoires de l’Académie Royale des Sciences : 545-576. Texte intégral