Vocation d'un sol ou terrain - Annexe 3

De Les Mots de l'agronomie
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Cette annexe se rapporte à l'article Vocation d'un sol ou terrain.

Planifier en considérant des évolutions diverses pouvant être réversibles

(Extraits de Dumont, 1946, Le problème agricole français, chap. 2 : La production fourragère domine l’agriculture français, p. 34-54)

((L’ouvrage commence par un panorama de l’état nutritionnel de la population française au sortir de la guerre, avec l’absolue nécessité d’augmenter la consommation de protéines, en particulier animales : viande et surtout lait.

Le chapitre dont nous citons des extraits traite plus de masses globales que de localisations, mais ce qui modifie les premières a forcément un impact sur les secondes ! Sans que le concept de « vocation » y soit évoqué une seule fois, ce texte est une magnifique démonstration de son extrême relativité... ou élasticité !))


II. — La grande « élasticité » superficielle.

Quelle surface réserver aux différentes formes de production ? (...) nous avions précédemment proposé une répartition du territoire agricole. Nous préférons ne plus donner de chiffres qui reposent sur trop d'hypothèses, alors que nous ignorons même leurs probabilités de réalisation. Soulignons cependant que ces possibilités d'intensification (...) donnent à l'étendue que réclame la nourriture de nos animaux une grande souplesse. Il est heureux, pour nos futurs planificateurs, que l'on puisse jouer sur une large élasticité du facteur superficiel le plus important.

Dans notre plan, l'ensemble des prairies naturelles, herbages, pâturages, peut-être considéré comme la réserve des terres disponibles (...). Il forme, dans notre projet de répartition du territoire exploité par l'agriculture, le « complément à 100 » à qui l'on pourra, dans certaines limites, se contenter d'attribuer la surface restante après satisfaction des autres besoins. Il suffira, pour compenser, d'intensifier plus ou moins ces productions. (...) (...) l'hypothèse d'une double déficience temporaire d'hommes et d'équipement, qui empêcherait l'exécution de ce programme, ne saurait être exclue. Alors, on devrait conserver, sinon même étendre les prés (...) Le niveau de production requis par le plan une fois atteint, on verra s'il y a lieu d'envisager un certain retour des formes semi-intensives de production; par exemple : nouvelle extension, au détriment des terres labourables, des herbages; mais, cette fois, traitées à la méthode Warbold. (...) Après une décade d'équipement, et surtout avec une motorisation poussée, il serait même possible, si nécessaire, de prélever un ou deux millions d'hectares sur le secteur fourrager, pour les affecter à d'autres productions indispensables : bien que cela nous paraisse peu probable.

(...) IV. — L'avoine et la motorisation. (...) Pour l'avenir, le plan de production ne peut être édifié sans connaître la politique adoptée en matière de motorisation. L’avoine est le carburant de nos moteurs animés. Dans l'immédiat, nous devons la développer, et la réserver aux productions « prioritaires » : animaux de trait, vaches laitières. Plus tard, la réduction de la cavalerie des villes, la suppression bien tardive de la cavalerie militaire, vont réduire les besoins de près d'un quart sur l'avant-guerre. Si, en outre, comme nous le préconisions, on se lance hardiment dans la politique d'équipement agricole indispensable à la compression de nos prix de revient, nous aurons d'ici cinq ans 200.000 tracteurs. Même en tenant compte de l'utilité de ne plus faire travailler les vaches, et de la réduction des bœufs de trait, même en conservant un élevage de race, un million de chevaux seront alors amplement suffisants, si le « plein emploi » des tracteurs est assuré. Or, tout cheval remplacé par le tracteur libère un peu plus d'un hectare d'avoine. La superficie devrait, dans l'hypothèse ci-dessus, descendre en dessous de 1.500.000 hectares. Mais, compte tenu de la consommation accrue des volailles, des ovins, du cheptel de rente en général, il est peut-être prudent de compter 2 millions. Ce qui en libère un million et quart pour les autres productions, notamment fourragères intensives.

(...) De 750.000 hectares, la superficie consacrée à cette culture ((l’orge)) pourrait s'élever jusqu'à 1.500.000 hectares, pour revenir peut-être ensuite autour d'un million d'hectares. Si une transformation plus radicale de nos méthodes de travail, grâce à un équipement rapide en matériel moderne, nous permettait une plus forte intensification de nos systèmes de culture, on pourrait alors mettre de suite l'accent sur l'extension des fourrages les plus productifs, et du maïs, en corrélation d'un moindre accroissement de l'orge.

(...) De 3 millions d'hectares vers 1800, la surface qu'il ((le seigle)) occupe est passée à 700.000 en 1938, produisant 800.000 tonnes. Ce mouvement de régression, accentué par la guerre, persistera probablement. Cependant, les rendements élevés obtenus en Allemagne, en Pologne, en sols pauvres, donnent à réfléchir. D'autre part, la paille constituera peut-être une recette plus intéressante, si l'on développe la papeterie, et les autres usages industriels (cannage de chaises, paillons pour l'exportation des bouteilles de vins fins, horticulture, etc...). »